
Un jour parmi les dix derniers jours du Ramadan à Paris : Il fait un peu plus frais, je me réveille tôt et je peux ouvrir les fenêtres. Il y a déjà des touristes asiatiques qui se dépêchent de se rendre quelque part. Je me demande où, si tôt.
Un clochard, que je vois parfois, est installé au pied d’un immeuble, avec son bonnet d’hiver et son chien tout maigre. Une camionnette de services se gare à côté de lui, deux hommes en descendent et s’affairent, et le monsieur assis les suit constamment du regard.
Peu après, les employés de l’immeuble d’en face commencent à arriver en même temps, ils se font la bise dans la rue.
C’est le moment de tirer un peu les rideaux pour éviter d’être vue.
Je voudrais que la journée ne commence pas , qu’elle se limite à regarder les gens par la fenêtre. Les premières livraisons, les sales boulots, les gens pressés, les quelques uns qui rentrent.
Quand je sors, c’est déjà un peu plus animé. Je passe devant les marches d’une église, où un groupe de touristes se tient autour des chiots d’un autre vagabond. Ils sont émerveillés par tant d’adorabilité et restent stationnés devant lui. Lui, il sourit, son carton de petits chiots posé à côté.
A chaque fois, c’est le même cinéma autour. Ca m’emmerde un peu, parce que le type avec le chien tout maigre, personne ne lui prête autant d’attention. Alors qu’il a des yeux encore plus beaux.
——————————————————————————————————————————————Bien plus tard la nuit, après minuit, il y a pas mal de bruit qui vient de la rue. Je sais que ça embête les voisins du dessous qui ferment toujours la fenêtre. Moi, ça me plaît, je regarde. Des fois j’ai presque peur de tomber tellement je regarde. J’ai découvert que c’était l’arrière rue d’une boite de nuit et que les clubbers garaient ici. Musique à fond dans la voiture, ils en descendent en faisant un boucan. Les garçons ont souvent l’air de tocards, et les filles over-dressed.
Cette nuit, il y a 3 filles et un mec qui se préparent à y aller. Voiture garée, corps dehors mais derniers préparatifs dans la rue! Elles portent toutes trois des robes très courtes et très moulantes et des talons très hauts. Les cheveux longs, bien raides. L’une d’entre elle sort une brosse à cheveux de son grand sac et se recoiffe. Elle brosse encore, et beaucoup, avec vigueur. Je me demande ce qu’il y a encore à brosser. Je sais pas ce qu’ils attendent mais ils tardent un peu. Elles finissent enfin par ranger leur grand sac dans le coffre, et gardent des petites pochettes. Tac tac tac jusqu’au bout de la rue, jusqu’au bout de la night. L’une des filles est gracieuse dans sa démarche, les autres les pauvres.
Je les vois disparaître, et je les imagine ensuite faire la queue, se poser en souriant devant le videur, entrer en boite, examiner les lieux, commander à boire difficilement, danser un peu, rigoler beaucoup, se faire coller par un relou à jeter, se faire tourner autour par un autre, plus joli.
Chercher des yeux un autre homme, la possibilité d’une aventure.
J’aurais dû rester là toute la nuit et attendre de voir s’ils revenaient tous ensemble, mais j’ai pas encore atteint ce point.
Un jour peut-être.
———————————Voilà, le Ramadan c’est fini depuis un petit moment déjà mais je n’ai pas eu l’occasion de raconter d’autres séquences. Il n’y pas grand chose à dire non plus, si ce n’est que les gens passent et que le temps passe. Les dix derniers jours ont été tantôt lourds, tantôt légers. Ils seront toujours le souvenir de notre Nesrine, disparue le 18 juillet 2014. Elle avait des projets de travaux filmesques sur ces scènes qu’on voit ou qu’on imagine se passer dans les étages d’un bâtiment en face, les corps superposés qui cohabitent à longueur de journées. On en parlait beaucoup, j’étais moi-même fascinée par cet imaginaire ici, ou ici (mais en mode kar3ajia-gossip girl que je suis 😉
J’ai envie de lui dédier toutes mes vues.
Mamzelle Namous
Hada makan
le 3 août 2015 à 21h39prems
Hada makan
le 3 août 2015 à 21h40prems,
sinon sympa l article, tu devrais descendre pour voir et etre vu en boite, ca t’occupera et qui sait ? tu remontras peut etre pas seul
Leila
le 3 août 2015 à 21h57Une petite pépite ma chère . Merci pour les liens , ils permettent de relire pour ma part .
Allah yerhamha …..elle devait être une personne très particulière cette Nesrine …
Mina Namous
le 4 août 2015 à 3h26@ Leila Merci:) yes she was!
@ Hada makan : jebda!
Essah
le 4 août 2015 à 12h32Je ne t’avais pas remarqué au balcon… c’est vrai que j’étais bien accompagné des trois robes très courtes et très moulantes et des talons très hauts
Sinon Paris loin du ramadan ça donne quoi ? Un happy fan s’organisera ou pas ?
Essah
le 4 août 2015 à 13h05Un petit commentaire sur la photo du jour, ou plutôt les photos du jour. Je kiff celle en 2eme ligne, 2eme colonne :
ça sent le voyeur qui attend depuis un long moment que la voisine se déshabille et au moment où il perd espoir de nourrir son imagination fantasmagorique du soir, la voilà si belle, si voluptueuse et si sexy, qui passe et repasse en gandoura !!!! Là croyez moi il déchante mais se promet de revenir le lendemain plutôt au risque de se voir lui même voyeuriser par le voisin mari de la gandoura 😀
Fantôme
le 4 août 2015 à 16h23C’est du bon!
Paris, la ville, les ombres…
Mina Namous
le 4 août 2015 à 16h32@ essah : hi hi ! c’est tiré du film » fenêtre sur cour », que je te conseille chaudement si tu l’as pas déjà vu !
@ Fantôme: ah ben si c’est toi, c’est super bon pour moi 😉 merci!
Tfh
le 5 août 2015 à 9h49Je t’aime
MilaEve
le 5 août 2015 à 10h22Que j’aime ces posts de contemplation ! Il ne s’y passe rien et pourtant il y a tellement de choses qui passent !
Mina Namous
le 5 août 2015 à 10h30@ Tfh : alors moi aussi 😉
@ MilaEve: ah ton message me fait intensément plaisir, merciii!!
Essah
le 5 août 2015 à 10h37@Mina : je vais voir…
@Fantôme et Mila : mais c’est des choses insignifantes et sans grand intérêt. c’est juste que les écris de mina les rendent un poil excitant
@Tfh : nous aussi… on t’aime bien évidemment et non pas on l’aime :D:D
Sinon quand est ce qu’on va boire un verre tous ensemble ? :p:p:p:p
Chatnoir
le 6 août 2015 à 18h08Voilà, je m’absente quelques temps et jeune vie algéroise se mue en jeune vie parisienne… fenêtre sur rue… et j’espère pas jambe dans le plâtre…
Mais ta rue a l’air sympa.
La boîte de nuit à deux pas de mon studio, j’ai connu aussi cela dans ma jeunesse… La Java, rue du faubourg du temps dans le 11ème, pour ne pas la citer, beaucoup moins sympa dans le temps en terme de fréquentation surtout les dimanches après-midi avec les vieilles femmes au rouge à lèvres qui déborde et au bleu pas très frais sur les paupières qui sortent bras dessus bras dessous avec des ivrognes édentés.
Pas sympa, la java, mais insonorisée. Un couple d’amis américano-brésilien a habité pendant un an au-dessus d’un restaurant qui passe tous les soirs la chanson : « Volare! Oh Oh! Cantaré ! Oh Oh Oh Oh! ». Au début, ils trouvaient ça sympa. Au bout d’une semaine, ils avaient commencé à juger que c’était un peu répétitif. Au bout d’un mois, ils étaient prêts à sortir le fusil au quatrième « Oh! »… Négociations à l’amiable avec le proprio, plainte commune à la police avec les voisins… rien n’y a fait : six mois plus tard, ils en étaient encore à « Volare! Oh Oh! Cantaré ! Oh Oh Oh Oh! »…
Boules Quiès en dernier recours, mais même s’ils n’entendaient plus, ils sentaient les vibrations et connaissant la chanson par coeur, ils identifiaient parfaitement le « Oh Oh Oh Oh! ».
Ils ont déménagé un an plus tard dès que leurs moyens leur avaient permis, mais n’ayant plus de point de fixation commun se sont séparés trois mois après.
Mina Namous
le 6 août 2015 à 19h37@ chat noir : haha la chute ! Ces oh oh oh qui soudent un couple !
Café Mode
le 14 août 2015 à 8h14Toujours aussi fan de ton style. A quand le roman ?
Mina Namous
le 14 août 2015 à 8h26@ café mode : ah le roman… j’ai toujours eu du mal à dépasser les quelques pages, mais j’y travaille 🙂 Merci beaucoup !
Nadia
le 16 août 2015 à 14h19L’aube, quelle atmosphère particulière. L’humain s’acharne sur ses petites taches presque mécaniques comme le petit oiseau qui va nettoyer ses ailes au bord d’un lac. J’aime l’aube, je le rate chaque matin !