Quantcast

Archive du mois : avril 2012

Il Pleut de la Boue

 

 

 

Jeudi 12 Avril, Ben Bella est mort hier.

 

Jeudi est une journée comme les autres, sauf qu’on parle de « ça ». D’une façon particulière je trouve, qui a la maladresse d’un moment intime.

 

Jeudi, il fait moche, il pleut, il fait qu’on étouffe.

Je dois prendre la voiture pour me rendre dans le quartier où j’ai grandi, chercher des trucs. Ce coin, c’est un gouffre, quand on y entre on n’en sort plus. Les ruelles, les voitures qui côtoient les piétons, les enfants.

Le temps est lourd.

lire la suite

Jeunes Vies Caramélisées

 

Once upon a time,  j’attendais le coup de fil d’un mec.
Je fixais mon tel, je sursautais à chacune de ses vibrations, j’insultais les gens qui m’appelaient et qui n’étaient pas lui, et j’avais mal au ventre.
Au fil des jours, après notre premier rendez-vous, n’ayant aucune nouvelle de lui, n’osant pas faire le premier pas ( parce que bouhhh c’est la honte), je me laissais doucement mourir.
Adieu recourbe-cils et soin éclat, le maquillage n’avait plus de raison d’être. J’errais dans la vie en jean et cheveux gras, dans l’attente de voir son nom s’afficher sur mon tel.

Matin Brun

Une fois, on avait évoqué la fermeture des bars en Algérie,  et j’avais repensé à un mini texte que j’avais lu  il y a longtemps. Je voulais le partager mais impossible de me souvenir du titre et ou de l’auteur. Ce matin, en fouillant dans les cartons, je le retrouve.  Ca s’appelle  » matin brun » et c’est de Franck Pavloff.
Une petite nouvelle qui m’avait beaucoup plu. Ca m’a fait un peu moins d’effet à la relecture aujourd’hui, mais  c’est un texte auquel je repense souvent.  C’est certes une dénonciation des dérives totalitaires,  mais, parfois, certaines situations particulières, isolées, limite anecdotiques,  y font écho…..
Ca se lit très facilement et très vite, alors  voici le texte  :

Si tu vas à Gao………

 

Quand je m’ennuie, je regarde France 24. J’arrive jamais à écouter ce qui se dit, car je ne peux pas m’empêcher de lire les brèves qui défilent en bas de l’écran, ça me déconcentre.
L’autre soir, alors que je  ne comprenais rien à ce qui se passait au mali ( en résumé, khalouta makhlouta* ), j’ai lu : « sept diplomates algériens enlevés à Gao, Mali« .

How can you forget to breathe

Aaaaa j’aime pas le week-end, j’aime pas entendre le jeudi aprèm’ les gens s’exclamaient que ouf c’est enfin le week-end!  Ce sont les mêmes qui, dimanche, se plaignent qu’avec les enfants et les obligations, et les courses, on ne se repose plus.  Font chier avec leurs gosses, les gens.
Ils  ne parlent que de ça, ils font semblant que tout tourne autour de ça. Si t’as le malheur de vouloir décaler un rendez-vous de dix minutes avec une amie mère de famille ( je commence à avoir des copines qu’ont des mioches, je me fais moins jeune) , elle te sort direct un discours sur comment elle programme tous ses rendez-vous une semaine à l’avance, à cause des enfants, de la bouffe de son mari, et des courses, et que tu peux pas lui faire ça, ça va trop chambouler toute sa vie.
Ok ma fille, je serai à l’heure, faudra juste que l’esthéticienne se dépêche un peu sur mes poils.  Mon épilation du minou en prendra un coup, mais c’est pas grave.  Tu vois, moi aussi je fais des sacrifices.

Commentaire!

Hier, suite à la dernière publication, j’ai reçu ce commentaire :
 » Pour le coup je ne me dis pas la même chose. Je serai bien plus heureuse ailleurs, ce qui me retient c’est les miens, je ne peux pas envisager de ne pas être là le jour où l’un de mes proches mourra. En un mot ce qui me retient c’est la mort. En même temps ce pays tellement dur à vivre agit comme une sorte de catalyseur chez les bienheureux, il les pousse vers l’essentiel. L’Algérie est intellectuellement stimulante mais c’est aussi une source d’angoisse permanente.  Beuh.« 

Je ne suis pas complètement dans la même logique, mais avec la  phrase  » ce qui me retient c’est la mort » Beuh ( savoureux pseudo!) a mis les mots sur plein de choses qu’on identifie mais qu’on ne rationalise pas. Vais pas rentrer dans les détails, parce que ça va être morbide, mochement triste et maniéré, que je vais me mettre à pleurer, que  la khnouna*  va couler  et qu’on se dira « bouh ce blog c’est plus ce que c’était!« . 

Mais hier, j’écrivais un billet où je disais que j’aimais trop rire pour quitter Alger, et où je me rendais bien compte de la possible légèreté de cette motivation. Sans pouvoir mettre la main sur quelque chose d’un peu plus essentiel. 
Beuh l’a fait pour moi! 

Y a quelques semaines, une bonne femme m’a dit «  je suis sûre que t’es rentrée parce qu’on t’a pas renouvelé ta carte de séjour« .  Y a des gens qui voient que du moche dans les choix qu’ils ne peuvent pas concevoir , et jamais les êtres derrière les actes. 
Je suis contente qu’ici on arrive à se partager pour de vrai!


Mamzelle Namous

*Faut-il vraiment traduire ce joli et tendre mot? 

Risible légèreté de mon Être

Ma soeur, celle qui s’est barrée en Asie, elle me manque. Elle me manquait déjà avant son départ, quand elle préparait son projet, et je ne savais plus quoi faire pour la retenir.
Là, le temps passe et ça empire. Souvent je l’appelle et je la supplie de revenir, car égoïste je suis. En général, elle sourit et me dit «  Je peux pas, à cause du travail. Viens toi, plutôt« .  J’y pense trois minutes, je visualise un peu les choses , et je suis prise de panique. Car en ce moment, pour des raisons qui me sont floues, je ne me vois pas vivre ailleurs qu’à Alger.

Hier matin, je harcelais encore ma soeur pour qu’elle revienne et elle m’a avoué qu’elle  n’avait jamais été aussi heureuse qu’à Alger, malgré les difficultés.
Dans sa vie, elle a pas mal vadrouillé, oublié où elle était née, et habite actuellement dans un cadre paradisiaque.  Alors, le caractère irréductible de son affirmation peut paraître légèrement décalé de la réalité! Mais je ne vais pas me lancer dans un réflexion sage et moite  sur le sens de la vie,  y a les livres de Kundera pour ça.
Alger, c’est chiant. C’est une ville associée à l’ennui, pour cause de plein de raisons. Les hommes crachent partout et tout le temps. J’ai toujours peur que mes lacets ne se prennent un crachat et j’ai envie de crier à la horde des mecs-crachoirs  » la salive ne tue pas, vous pouvez la garder pour vous!« 
Mais on a la  chance, ici, de pouvoir prendre beaucoup de hauteur vis-à-vis des petites et grandes choses de la vie. On vit dans la galaxie du destin et on sait accepter, avec sagesse, la fatalité.  Parce que la vie est régie par une notion qui semble très simple, tant elle est ordinaire : « el mektoub« . ( Le grand destin dont nous ne maîtrisons rien).
T’as pas eu ce job  » maalich, kelchi bel mektoub« , ton arrière grande-tante est morte « hada houwa el  mektoub« , t’as raté l’homme de ta vie , pareil.
La robe que tu voulais acheter n’est plus disponible en taille 34, la vendeuse te dira, avec tout le mélodrame dont sa voix est capable « maketbetlekch, hada maken mademoiselle ». 
On aime en faire un peu trop avec l’irréel.

Toujours est-il que comme ma soeur, je ne suis jamais aussi heureuse qu’à Alger.
Je suis incapable de dire pourquoi, mais la simple pensée d’un déménagement dans un autre pays me met de la nostalgie à la gorge.  Sans en être sûre, je crois que c’est à cause des éclats de rire. Des remarques et des situations piquantes et hilarantes  typiquement algériennes qui surgissent partout et tout le temps. C’est rien, ça fait rire une minute, sourire quand on y repense, ça passe. Et la leguia reprend ses droits.
C’est sûrement trop creux comme motivation ou explication. Mais  cet humour algérien, on a du mal à s’en passer. Il  donne une allure au quotidien et rythme une vie.
Alors quand ma soeur me dit  » je n’ai jamais aussi heureuse qu’à Alger« , je la crois, je la comprends, et j’ai sa phrase en héritage.
Mamzelle Namous