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Quand je suis revenue vivre à Alger, c’était pour passer du temps en famille. J’avais fait mes petits comptes et on avait encore un an ou deux ans à être tous ensemble, avant que ma sista ne parte à l’étranger et que le frérot ne se marie.

Envie donc de profiter du temps avec eux plutôt que de rester seule, là-bas, dans un 20 m.carré vide, avec des problèmes de chauffage, un compte tout le temps à découvert (je vais pas faire le couplet de la misère étudiante, j’aimais juste vivre au dessus de mes moyens).

Je rêvais de trois choses la dernière année à Paris:

 

-Un appart, un vrai.

-Un boulot, ou un stage. Ou n’importe quoi qui s’apparente à une activité professionnelle.

-Un mec, un vrai. Pas un déjà maqué. Pratique d’ailleurs abandonnée en 2008 parce que ça craint vraiment: vous pensez que ça va juste être fun, les avantages d’un mec sans les inconvénients d’une relationship (genre vous avez le choix). Vous vous amusez à mépriser la nana cocue, et quand vous découvrez qu’elle utilise un shampoing pour cheveux gras, vous textotez votre meilleure amie pour vous moquer « Bouuu elle a les cheveux gras, khmimja hadi! » *

 

Alors que vous utilisez le même genre de shampoing, sauf que le sien c’est un palmolive et le vôtre un leonor greyl.

 

Bref, passons, on y reviendra tôt ou tard. Ne me jugez pas s’il vous plaît, j’étais seule et je m’ennuyais et j’étais faible. Et jeune, et je voulais m’amuser, et merde.

 

J’étais donc insatisfaite de ma vie et je comprenais de moins en moins l’intérêt de vivre loin des gens qu’on aime vraiment.

Alors un jour, quand une opportunité s’est présentée à Alger, j’ai pas trop hésité. Enfin, opportunité c’est un grand mot, la charika watanya** quoi.

 

Bien sûr, j’appréhendais un peu la vie avec les parents, mais frérot et sista étaient là pour tout dédramatiser et rendre les choses, même les plus pénibles, drôles.

 

Par exemple, ils sont là à vous faire rire quand votre père vous crie dessus pour un rien. Genre il vous insulte, vous balance de phrases comme « tu n’as pas évolué» parce que vous avez oublié de légaliser un document ou d’éteindre la lumière.

Son délire à votre papa, c’est de remettre en cause votre intelligence et cursus universitaire à la moindre faille dans votre système, à coups de « Kritiiii ntia??». ***

 

C’est pas traumatisant hein ( une algérienne n’a pas de daddy issues à l’américaine, ça n’existe pas) mais ça peut être lourd à la longue, et c’est que là fratrie est précieuse pour caricaturer et tourner en dérision le quotidien.

Mais au bout d’un an sista s’est barrée et on a larmé l’oeil, et une année plus tard, frérot s’est marié, mais on n’a pas pleuré, on avait plus d’énergie pour ça.

Et puis y a pas trop quoi pleurer, il est pas allé bien loin, ma belle-soeur est un ange et sa famille est notre nouvelle famille. ( Non je n’écris pas sous pression).

 

Avec les beaux-parents justement, l’existence de mes parents s’est ornée de nouvelles questions:

 

-Qui doit appeler l’autre les jours de fête? Le couple le plus âgé, non?

-Chez qui aller pour achoura et l’mouled d’ailleurs ? On doit les inviter ou c’est à eux?

-Qui fait la meilleure Chekhchoukha? ****

 

On se perd en mondanités.

 

Mais voilà, malgré les jolis moments, la vie me paraît un peu lourde ces derniers mois. Plus que d’habitude en tout cas. J’ai cherché à comprendre et à y pallier.  Je suis sortie un peu plus, pour changer (en Algerie, on ne sort pas pour s’amuser particulièrement, mais pour changer. Formule consacrée).

Je me suis dit que j’avais besoin de vacances ou de démissioner. Tout paraissait sans saveur.

 

Y a quelques jours, en relisant d’anciens articles et commentaires du blog ( je fais ça parfois, ne me jugez pas), je me suis rendue compte qu’après chacun des deux départs, la dynamique qui me pousse à écrire avait un peu changé.

J’avais jamais fait le lien avant et j’avais pas bien réalisé à quel point ça changeait tout pour moi.

 

Maintenant que la raison de mon retour n’est plus d’actualité, une amie m’a demandé pourquoi je repartais pas.

Comme si c’était facile de partir, déjà.

Comme si c’était facile de laisser ses parents. Et sa grand-maman.

De laisser les amitiés, le bougainvillier, la mer, l’air, l’humour, le dégoutage collectif, vous.

De laisser les traces de vie.  Et les cours de yoga où quand le prof dit « relaxez vous et faites le vide», une nana lui répond «ow krahna men l’vide, ».*****

 

 

Comme si c’était facile de quitter quelque chose de pas toujours très stimulant, certes, mais qui vous rapproche pourtant de l’essentiel quelque part.

Sans savoir vraiment pourquoi et pour combien.  ******

 

 

 

 

 

 

Mamzelle Namous 

 

* Cette petite cradouillette. 

**Entreprise publique  administrativement administratrice, mais commerciale.

***T’as fais des études toi?? non mais t’es allée à l’école toi un jour? 

****Traditional meal very yummy!

*****On en a marre du vide, y a déjà que ça dans nos vies!

******Et je lui ai répondu à mon amie : Je reste! Comme dans question pour un champion;)