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Comme je l’avais dit, je suis en France, et j’avais décidé de manger de la chorba en sachet!
Premier test, jour 1, avec un paquet Jumbo ramené d’Alger. Dix minutes avant 22h, je mets donc le contenu  dans de l’eau et je touille en chantant l’ancien slogan jumbooo jumboooo! l’ banaa l’banaaaaaa! heureuse qui comme Ulysse a traversé la méditerranée avec les senteurs du pays.
Résultat : Digoulasse. Un manque de goût, orné pourtant d’un étrange et vague arrière-goût d’agneau (mais c’était peut-être dans ma tête).
J’ai dû trop chanté et pas assez touillé, parce que les vermicelles sont restés au fond.
Tout ce monde a donc fini dans les canalisations, saha ftourkom!

 

Jour 2, la journée s’annonce longue, elle commence par un mal de tête. Rester au lit toute la journée, à l’abri du temps un peu chaud, des boissons fraîches sur les terrasses de café, est un doux rêve. Mais il faut sortir, s’activer, vivre.
Dans le bus, la femme en face a son rouge à lèvres qui fuit, j’hésite à le lui dire mais je me lance, ça sera ma hassana* du mois. A côté, deux lycéennes regrettent de ne pas avoir dit au revoir à leur prof de maths et se demandent ce qu’elles vont faire pour la fête de la musique. Bien qu’elles en soient un peu lassées. Elles parlent de la soirée de Marc qui coïncidera peut-être avec celle de Pauline, que faire, que faire?

 

Le soir,  y a Koh Lanta à la télé, ils bouffent des insectes, ça me coupe le peu d’appétit que j’avais ! Si fatigue et soif sont au rendez-vous, la faim se fait vraiment discrète.
J’apprécie à ce moment là d’être seule et de ne pas être prise dans le tourbillon pré-maghreb des cuisines  familiales! Je peux juste m’asseoir et m’imprégner des valeurs de paix et de recueillement inhérentes au jeûne, et comater devant la télé sans que personne ne m’embête.

 

Jour 3 , quelqu’un me dit qu’il m’aimait encore et que les plats chez le traiteur-patissier la bague de kenza sont bons. J’y vais, c’est vrai que l’étalage est impressionnant. Comme j’ai la grande maîtrise de moi-même , je n’achète pas tout.
Tant mieux, parce que le soir venu, je constate encore que l’appétit est petit. Je me dis que ça y est je mûris, j’ai de la grande sagesse à l’intérieur de moi, et j’ai tout compris au Ramadan.
J’appelle ma mère pour frimer, elle me dit que c’est pareil pour tout le monde. Ah ok.

 

Jour 4. Si mes comptes sont bons, c’est dimanche. Une amie me propose une expo ( nourriture de l’esprit. C’est Tariq Ramadan qui l’a dit). On se promène un peu, on tombe sur le restaurant libanais Noura. Les boureks m’appellent. C’est pas moi, c’est eux.
La nana à l’intérieur nous demande mille fois si c’est pour consommer sur place. Non à emporter, on t’a dit. Non pas réchauffé, c’est pas la peine. 7 euros, merci au revoir. A ce rythme-là, je vais perdre un rein à la fin du mois.

 

L’aprem, c’est donc la fête de la musique… Koul wahad ighani b ghnah**, comme dit ma grand-mère.

 

Jour 5. Je crois que l’étourdissement me fait tourner la tête, je suis en quasi-émerveillement devant une vidéo ramadanesque de Tariq Ramadan. Chaque jour, pendant deux ou trois minutes, il parle des valeurs associées à ce mois, d’une façon hyper positive. J’ai pas tout vu, et même si j’ai jamais trop accroché avec ce type ( mais pas non plus la french diabolisation comme seuls les français savent le faire***), j’ai envie d’envoyer le lien à tout le monde. Mais avant d’appuyer sur « sent » , je me dis que si demain y a un attentat dans le quartier, ils vont chercher les islamistes du coin, vont tomber sur ma connexion réseau et je vais être fichée.
Je me suis contentée d’un petit like, et encore j’ai peur.
La paranoïa de l’arabe, nouvelle valeur de moi-même.

 

Jour 6 : Oh bonjour Ibuprofène 😉

 

 

Mamzelle Namous

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*Bonne action
** chacun chante sa chanson
*** quoi je généralise?

 

p.s i love you so love me back : je suis fraîchement sur instagram , et sur twitter aussi si on se suit pas déjà!